Ça y est ! Après des mois d’attentes, Challengers, le nouveau film du réalisateur de Call Me By Your Name, est arrivé dans nos salles. Un long-métrage très attendu, précédé par sa réputation sulfureuse, qui s’est avéré bien au-dessus de mes espérances !

Je ne suis pas un très grand fan de Luca Guadagnino. Il fait partie de ces réalisateurs « hit & miss » : chacune de ses œuvres est une proposition radicalement différente de la précédente, mais la réussite n’est jamais garantie. J’apprécie beaucoup son style de réalisation, et je suis persuadé qu’il est un vrai artiste, mais il faut dire que je n’ai jusqu’ici été que peu convaincu par sa filmographie : entre son trop timide Call Me By Your Name et son remake mitigé du Suspiria de Dario Argento, Guadagnino ne m’a jamais conquis jusqu’ici, malgré son talent incontestable en matière de mise en scène. Et je ne m’attendais pas à l’être avec Challengers. Initialement prévu pour sortir chez nous sur Prime Video (heureusement cela n’a pas été le cas), cette romance dans le monde du tennis n’avait, sur le papier, pas grand-chose d’excitant (ironique vu à quel point le marketing jouait la carte de la sexualité).

Un an et demi après sa romance cannibale avec Timothée Chalamet et Mark Rylance, Bones and All (récompensé à Venise), c’est une histoire complétement différente que Guadagnino vient porter à l’écran dans son nouveau long-métrage : celle de Tashi Duncan, espoir du tennis américain enchaînant les victoires, et de deux meilleurs amis (également tennismen), Art et Patrick, dont la relation est mise à rude épreuve par leur rencontre avec la jeune femme. Bien des années plus tard, les routes des membres de ce trio se recroisent lors d’un match décisif, qui va faire ressurgir leur passé commun. Un synopsis assez classique, qui laissait présager un énième film de triangle amoureux, dont le principal intérêt serait ses trois comédiens : Zendaya, Mike Faist et Josh O’Connor. Mais, à mon grand soulagement, Challengers s’est rapidement révélé être bien plus que cela, et, d’un postulat de base vu et revu, construit une intrigue aussi intense que palpitante !

S’il y a bien quelque chose qui est certain vis-à-vis de ce film, c’est que vous ne vous ennuierez pas : l’entièreté de l’œuvre est animée par ce dynamisme et cette énergie qui maintient le spectateur en haleine, notamment insufflée par la BO électrisante de Trent Reznor et Atticus Ross, qui vient donner aux séquences de matchs une toute autre dimension. Dans son ensemble, Challengers est un film très déconcertant, entre ses changements incessants de temporalité et la performance de Zendaya, à l’opposé de tout ce qu’elle a fait auparavant (j’y reviendrais plus tard). Mais ce qui surprend, c’est à quel point le film est éloigné de l’image que la promotion essayait de lui donner. Car au final, le film n’est que peu graphique : Guadagnino privilégie la suggestion et parvient, avec brio, a instaurer une tension palpable entre ses protagonistes – tension qui fait que le long-métrage est aussi prenant ! Je ne m’attendais pas à ce que Challengers soit aussi homoérotique, et pourtant on aurait pu s’en douter au vu du metteur en scène. Encore une fois, rien n’est montré, tout est suggéré, et la formule fonctionne à merveille.

C’est bien plus un film sensuel que sexuel. Et la sensualité, on la retrouve dans chacun des aspects du film : des bruitages à la direction d’acteur, en passant par les cadrages, le montage et la symbolique assez évidente de certains passages. Tout est fait pour maintenir cette tension sexuelle qui donne du mordant à une histoire qui, malgré ses multiples rebondissements, n’aurait pas été aussi intéressante autrement. Cette atmosphère moite est d’autant plus nécessaire qu’elle complexifie les relations entre les personnages – chaque regard est lourd de sens, chaque gémissement, chaque goutte de sueur veut dire quelque chose. Malgré l’écriture remarquable des protagonistes et les dialogues soigneusement conçus par Justin Kuritzkes (nouveau scénariste fétiche de Guadagnino), ce sont en fin de compte les non-dits et le sous-entendus qui font le sel de Challengers. Et dans ce registre, c’est peu dire que le casting excelle !

Je ne suis pas un grand fan de Zendaya. C’est indubitablement une bonne actrice, mais elle ne m’a jamais vraiment impressionné, et cela vient sans doute des rôles qu’elle incarne – qui se ressemblent un peu tous. Mais je suis obligé de reconnaître que sa prestation dans ce film est tout bonnement ahurissante ! C’est sans conteste l’une des meilleures performances féminines de 2024. Jamais on ne l’avait vu incarner un rôle comme celui-ci. En effet, dans Challengers, elle prête ses traits à Tashi Duncan, cette tenniswoman devenue coach à la suite d’une blessure et qui vit par procuration le succès des deux autres protagonistes du film. La carrière brillante qu’elle aurait pu avoir, elle la projette sur Art et Patrick, ces meilleurs amis dont la relation est ruinée par l’irruption de cette jeune femme dans leur vie. Non seulement Zendaya a une alchimie géniale avec ses partenaires de jeu, mais elle crève l’écran du début à la fin avec ce personnage de femme fatale envoûtante et glaçante à la fois !

Mais ce charisme et cette intensité n’éclipse pas pour autant les deux autres têtes d’affiches de l’œuvre, Mike Faist et Josh O’Connor – simplement car ils sont eux aussi époustouflants ! J’ai été très agréablement surpris par le premier, que je ne connaissais que pour son rôle dans le West Side Story de Steven Spielberg, et qui livre ici une interprétation fantastique ! Comme pour Zendaya, impossible de détacher ses yeux de ces deux comédiens, qui ont accomplis une véritable transformation physique afin d’incarner au mieux des champions de haut-niveau. Durant les séquences d’affrontements, ils sont sublimés par la photographie mais aussi par la mise en scène de Guadagnino. Il y a un contraste qui s’instaure entre les scènes de discussions et celles de matchs : là où les premières sont, comme je l’ai expliqué plus haut, dans la subtilité, les autres enchaînent les trouvailles visuelles (plans subjectifs ; un passage est même filmé du point de vue de la balle de tennis !) – le match n’en est que plus haletant, même si comme moi vous vous fichez complètement du tennis.

Je pourrais continuer longtemps sur ce Challengers, qui entremêle amour, amitié et rivalité avec une finesse que je ne soupçonnais pas ! Ce n’est pas un film parfait, mais c’est assurément le meilleur de son cinéaste et l’un des plus passionnant et divertissant de cette année 2024, par sa mise en scène trépidante, sa musique exaltante, ses personnages fascinants et son casting de rêve. À ne surtout pas manquer !

★★★★½

Challengers

Réalisé par Luca Guadagnino

Avec Zendaya, Mike Faist, Josh O’Connor…

En salles depuis le 24 avril 2024

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